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poser des modifications, si elle est adoptée. J’ai déjà prouvé que ces mesures et les principes sur lesquels elles sont fondées, étaient nécessaires au peuple. Je vais prouver qu’elles sont utiles aux riches et à tous les propriétaires.

Je ne leur ôte aucun profit honnête, aucune propriété légitime ; je ne leur ôte que le droit d’attenter à celle d’autrui ; je ne détruis point le commerce, mais le brigandage du monopoleur ; je ne les condamner qu’à la peine de laisser vivre leur semblables. Or, rien, sans doute, ne peut leur être plus avantageux ; le plus grand service que le législateur puisse rendre aux hommes, c’est de les forcer à être honnêtes gens. Le plus grand intérêt de l’homme n’est pas d’amasser des trésors, et la pus douce propriété n’est point de dévorer la subsistance de cent familles infortunées. Le plaisir de soulager ses semblables, et la gloire de servir sa patrie, valent bien ce déplorable avantage. A quoi peut servir aux spéculateurs les plus avides, la liberté indéfinie de leur odieux trafic ? à être, ou opprimés, ou oppresseurs. Cette dernière destinée, sur-tout, est affreuse. Riches, égoïstes, sachez prévoir et prévenir d’avance les résultats terribles de la lutte de l’orgueil et des passions lâches contre la justice et contre l’humanité. Que l’exemple des nobles et des rois vous instruise. Apprenez à goûter les charmes de l’égalité et les délices de la vertu ; ou du moins contentez-vous des avantages que la fortune vous donne, et laissez au peuple, du pain, du travail et des mœurs.

C’est en vain que les ennemis de la liberté s’agitent pour déchirer le sein de leur patrie ; ils n’arrêteront pas plus le cours de la raison humaine, que celui du soleil ; la lâcheté ne triomphera point du courage ; c’est au génie de l’intrigue à fuir devant le génie de la liberté. Et vous, législateurs, souvenez-vous, que vous n’êtes point les représentans d’une caste privilégiées, mais ceux du peuple français, n’oubliez pas que la source de l’ordre, c’est la justice ; que le plus sûr garant de la tranquillité publique, c’est le bonheur des citoyens, et que les longues convulsions qui déchirent les Etats ne sont que le combat des préjugés contre les principes, de l’égoïsme contre l’intérêt général ; de l’orgueil et des passions des hommes puissants, contre les droits et contre les besoins des faibles.[1]


Gazette nationale ou le Moniteur universel, n. 339, p. 1436 et 340, p. 1439.

Robespierre. Ce n’est pas la cause seule des citoyens indigens que je veux plaider, mais celle des propriétaires et des commerçans eux-mêmes ; je n ’indiquerai que des mesures simples, qui ont déjà

  1. Texte reproduit dans les Arch. parl., (LIV, 45-47, qui y ajoutent les interventions de da fin, d’après le Mercure universel.