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Séance du 8 thermidor An II

Le gouvernement révolutionnaire mérite toute votre attention : qu’il soit détruit aujourd’hui, demain la liberté n’est plus. Il ne faut pas le calomnier, mais le rappeler à son principe, le simplifier, diminuer la foule mnombrable de ses agents, les épurer surtout : il faut rendre la sécurité au peuple, mais non à ses ennemis. Il ne s’agit point d’entraver la justice du peuple par des formes nouvelles ; la loi pénale doit nécessairement avoir quelque chose de vague, parce que, le caractère actuel des conspirateurs étant la dissimulation et l’hypocrisie, il faut que la justice puisse les saisir sous toutes les formes. Une seule manière de conspirer laissée impunie rendrait illusoire et compromettrait le salut de la patrie. La garantie du patriotisme n’est donc pas dans la lenteur ni dans la faiblesse de la justice nationale, mais dans les principes et dans l’intégrité de ceux à qui elle est confiée, dans la bonne foi du gouvernement, dans la protection franche qu’il accorde aux patriotes, et dans l’énergie avec laquelle il comprime l’aristocratie ; dans l’esprit public, dans certaines institutions morales et politiques qui, sans entraver la marche de la justice, offrent une sauvegarde aux bons citoyens, et compriment les méchants par leur influence sur l’opinion publique et sur la direction de la marche révolutionnaire[1] et qui vous seront proposées quand les conspirations les plus voisines permettront aux amis de la liberté de respirer.

Guidons l’action révolutionnaire par des maximes sages et constamment maintenues ; punissons sévèrement ceux qui abusent des principes révolutionnaires pour vexer les citoyens ; qu’on soit bien convaincu que tous ceux qui sont chargés de la surveillance nationale, dégagés de tout esprit de parti, veulent fortement le triomphe du patriotisme et la punition des coupables : tout rentre dans l’ordre[2] ; mais si l’on devine que des hommes trop influents désirent en secret la destruction du gouvernement révolutionnaire, qu’ils inclinent à l’indulgence plutôt qu’à la justice ; s’ils emploient des agents corrompus, s’ils calomnient aujourd’hui la seule autorité qui en impose aux ennemis de la liberté et se rétractent le lendemain pour intriguer de nouveau ; si, au lieu de rendre la liberté aux patriotes, ils la rendent indistinctement aux conspirateurs, alors tous les intrigants se liguent pour calomnier les patriotes et les opprimer[3]. C’est à toutes ces causes qu’il faut imputer les abus, et non au gouvernement révolutionnaire, car il n’y en a pas un qui ne fût insupportable aux mêmes conditions.

  1. Ligne raturée : « Ce sont ces institutions qui nous manquent encore. » (Note orig.)
  2. Lignes raturées : « Tout marchera vers le véritable but des institutions révolutionnaires ; et la terreur imprimée au crime sera la meilleure garantie de l’innocence. » (Note orig.)
  3. Lignes raturées : « C’est ime mauvaise manière de protéger les patriotes de donner la liberté aux coup)ables ; car la terreur des criminels de la Révolution est la meilleure garantie de l’innocence. » (Note orig.)