Page:Œuvres complètes de Maximilien de Robespierre, tome 10.djvu/567

Cette page n’a pas encore été corrigée
563
Séance du 8 thermidor An II

Que n’a-t-on pas fait pour parvenir à ce but ? Prédication ouverte de l’athéisme, violences inopinées contre le culte, excitations commises sous les formes les plus indécentes, persécutions dirigées contre le peuple sous prétexte de superstition ; système de famine, d’abord par les accaparements, ensuite par la guerre suscitée à tout commerce licite sous prétexte d’accaparement ; incarcérations des patriotes : tout tendait à ce but. Dans le même temps, la Trésorerie nationale suspendait les paiements ; on réduisait au désespoir, par des projets machiavéliques, les petits créanciers de l’Etat ; on employait la violence et la ruse pour leur faire souscrire des engagements funestes à leurs intérêts, au nom de la loi même qui désavoue cette manœuvre. Toute occasion de vexer un citoyen est saisie avec avidité, et toutes vexations étaient déguisées, selon l’usage, sous des prétextes de bien public. On servait l’aristocratie, mais on l’inquiétait, on l’épouvantait à dessein pour grossir le nombre des mécontents, et la pousser à quelque acte de désespoir contre le gouvernement révolutionnaire[1]. On publiait

    été déguisées sous le prétexte du bien public, les persécutions suscitées au peuple sous le prétexte du fanatisme ; les apôtres de l’athéisme et de l’inimoralité étaient sans doute le plus fécond et le plus sûr moyen de parvenir à ce but. » (Note orig.)

  1. Lignes raturées : « On incarcérait, on persécutait les patriotes, on prodiguait les attentats pour en accuser le Comité de salut public. Ceux qui déclament contre le gouvernement et ceux qui commettent les excès qu’on lui impute sont les mêmes hommes. La conjuration contre le gouvernement a commencé au moment de sa naissance, et elle continue actuellement avec une nouvelle actiité. Les conjurés l’avaient d’abord attaqué collectivement ; ils le poursuivent maintenant en détail dans les membres qui le composent, et ils appellent sur une seule tête cette masse de mécontentement et de haine qu’ils s’efforcent de grossir pour en écraser ensuite tous les autres. Qui peut leur contester qu’il y a de l’habileté dans cette tactique ? Ils savent qu’il est plus facile de perdre un homme que de détruire une puissance, et ils croient bien plus à l’empire des petites passions qu’à celui de la raison et des sentiments généreux. On disait il y a peu de jours dans les prisons : Il est temps de se montrer : le Comité de sûreté générale s’est déclaré contre le Comité de salut public. On le disait dans la nuit même où se passa la fameuse séance des deux Comités dont j’ai rendu compte, et il fallut des précautions actives et extraordinaires pour maintenir l’ordre. On arrêta peu de jours auparavant des colporteurs de journaux qui criaient à perdre haleine : Grande arrestation de Robespierre. On répandait le bruit que Saint-Just était noble, et qu’il voulait sauver les nobles ; on répandait en même temps que je voulais les proscrire. Des fripons, apostés aux lieux où les conspirateurs expient leurs forfaits, cherchaient à apitoyer le peuple et disaient : C’est Robespierre qui égorge les innocents. C’était le cri de ralliement des contre-révolutionnaires détenus, c’était celui de tous mes ennemis, qui me renvoyaient les plaintes de tous les citoyens comme à l’arbitre de toutes les destinées. C’était le moment où l’on attaquait le Tribunal révolutionnaire, où l’on m’identifiait avec cette institution et avec tout le gouvernement révolutionnaire ; c’était le temps où le Comité de sûreté générale prêtait lui-même son nom et son appui à toutes ces manœuvres. Des libelles insidieux, de véritables manifestes étaient près d’éclore ; on devait invoquer la déclaration des droits, demander l’exécution actuelle et littérale de la Constitution, la liberté indéfinie de la presse, l’anéantissement du Tribunal révolutionnaire et la liberté des détenus. » (Note orig.)