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LES DISCOURS DE ROBESPIERRE


142. - SÉANCE DU 8 THERMIDOR AN II (26 JUILLET 1794)

Contre les factions nouvelles et les députés corrompus

Robespierre qui n’avait pas parlé à la Convention depuis le 24 prairial et qui était également demeuré à l’écart des séances du Comité de salut public[1], était malgré tout averti des menées qui se tramaient contre lui et qu’il dénonçait aux Jacobins depuis deux semaines. Le discours qu’il va prononcer le 8 thermidor constitue à la fois sa réponse et son «testament ».

Aussitôt après la lecture de la correspondance, «de bonne heure », il parait à la tribune où il parle pendant «environ deux heures ». L’Assemblée l’applaudit très vivement[2]. Lecointre (de Versailles), puis Barère demandent l’impression du discours contre laquelle s’élève Bourdon (de l’Oise) considérant qu’un examen par les Comités de salut public et de sûreté générale, mis en cause, s’impose du fait même de son importance. Mais Couthon s’oppose au renvoi. Plus encore, il propose qu’on le diffuse dans toute la République, souhaitant ainsi obliger les députés à se prononcer nettement et les intrigants à se dénoncer. Sa proposition est adoptée[3].

Mais les représentants visés par le discours de Robespierre interviennent successivement. Vadier d’abord, souligne la gravité de l’affaire Catherine Théot[4] qu’il a dévoilée et justifie le Comité de sûreté générale auquel il appartient. Puis Cambon se plaint des accusations portées contre les décrets qu’il a fait voter, notamment celui qui concerne les rentes viagères[5] ; il s’en prend à Robespierre «qui paralyse la volonté de la Convention ».

La discussion «devient bruyante ». Après Billaud-Varenne qui se défend d’avoir éloigné les canonniers de la capitale[6], Fréron demande «le rapport du décret qui autorise les Comités à faire arrêter les membres de la Convention »[7]. Il est appuyé par Panis qui insiste pour que la liberté des opinions

  1. Voir A. Mathikz, « Les séances des 4 et 5 thermidor an II aux deux Comités de salut public et de sûreté générale » (A. H. R. F., 1927, p. 193) repris dans Girondins et Montagnards, p. 139-170 ; et E. Hamel, III, 708-12. Cf. également lettre de Voulland du 9 therm. II, dans Girondins et Montagnards, p. 177-78.
  2. Voir notamment le Sans-culotte, n° 528, p. 2119.
  3. La majorité paraissait encore favorable à Robespierre, mais, comme le remarque Buonarroti (A. Mathiez, « La politique de Robespierre et le 9 thermidor expliqués par Buonarroti » dans Ann. révol., oct.-déc. 1910, repris dans Autour de Robespierre, p. 249-94. Voir p. 274) « on put remarquer une grande incertitude dans l’esprit des députés ». Voir aussi A. Mathiez, « Les divisions dans les comités de gouvernement à la veille du 9 thermidor » (Revue historique, 1915).
  4. Voir rapport de Vadier du 27 prair. II dans Mon., XX, 737-42 ; et A. Mathiez, Contributions à l’histoire religieuse de la Révolution française (Paris, 1907), p. 96-142 ; Nouveaux témoignages sur Catherine Théot (Ann. révol., 1919, p. 388-92) repris dans Autour de Robespierre, p. 130-36. Cf. également ci-dessus, n° 1.33, p. 504.
  5. Séances des Ier et 2 germ. II. Voir Arch. pari., LXXXVII, à la date : Ier germ., n" 78 ; 2 germ., n° 40.
  6. Voir Gai Herlaut « Camot et les compagnies de canonniers des sections de Paris au 9 thermidor » (A. H. R. F., 1951, p. 9) ; et A. Soboul, Les sans-cutottes parisiens…, p. 1003.
  7. Il s’agit du décret du 22 prairial, dans lequel cette clause ne figure d’ailleurs pas, mais qui provoqua les craintes des députés. Voir G. Lefebvre, « Sur la loi du 22 prairial an II » (A. H. R. F., 1951, p. 225 ; repris dans Études sur la Révolution française, p. 67-89. Cf. p. 84-86).