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La seconde partie du sujet est celle où la raison exerce toute sa puissance, parce qu’elle est toujours secondée par le sentiment. Le préjugé est-il plus funeste qu’utile ? Qui peut douter dans une pareille question ? Ce qui est souverainement injuste est toujours souverainement mauvais. Tel est le principe, d’où part l’auteur. Cependant il s’arrête bientôt, pour examiner et apprécier à leur juste valeur, les avantages qu’on attribue au préjugé. Il resserre les liens de famille ; il prévient les crimes, en intéressant tous les parens à réprimer les dangereux penchans, les vices naissans dans un mauvais sujet, qui leur appartient. La discussion de l’auteur, sur tous ces points, est toujours solide et persuasive. Il est permis aux familles de se prémunir contre le malheur qui les menace, en implorant les secours de l’autorité. Quel remède ! Comment ne voit-on pas qu’il est lui-même un véritable désordre dans la société. L’auteur parcourt ensuite tous les maux que le préjugé entraîne ; et, dans les familles, où il voue, au gré du hasard, un grand nombre d’hommes innocens, d’hommes recommandables par différens genres de mérite, à une véritable dégradation, une véritable proscription ; et dans l’État même, qu’il prive de sujets précieux, forcés de s’exiler, où il condamne en quelque sorte des gens de bien à devenir des scélérats, parce qu’il est naturel de chercher les profits du crime, quand on ne peut plus espérer les récompenses de l’honneur. Mais le plus grand des abus du préjugé, ou plutôt son plus grand crime, est d’arrêter les rigueurs de la justice lorsqu’elles sont prêtes à tomber sur une famille respectable ou en crédit.

« Que sera-ce lorsque les familles… jusque… qui sont la base de l’ordre public ».

Je céderais au plaisir d’exprimer tout ce que m’inspire ce morceau, si je n’avais traité le même objet, avec les mêmes idées et les mêmes sentimens. Nulle part, je n’ai plus senti jusqu’à quel point deux écrivains pouvaient se rencontrer. Cette ressemblance me paraît assez piquante, pour hasarder de mettre en comparaison un morceau de mon ouvrage, avec celui qui me paraît le meilleur du discours de M. de Robespierre.

« S’il est effrayant de voir, sur de légers soupçons, sur des accusations qui, au moins, n’ont pas une forme légale, et par là restent toujours suspectes, des hommes descendre pour la vie dans ces prisons que la loi n’ouvre pas, où elle n’étend pas même