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National un vieux monsieur qui avait sa voiture, une belle voiture à quatre chevaux, un courrier en avant et un domestique. Enfin, Jérôme, qui a vu la voiture au départ, prétend que ce ne peut être qu’un prince ou qu’un milord.

— Y avait-il sur la voiture une couronne fermée ! dit Philomène.

— Je ne sais pas, dit Mariette. Sur le coup de deux heures, il est venu chez monsieur Savarus en lui faisant remettre sa carte. En la voyant, monsieur, dit Jérôme, est devenu blanc comme un linge et il a dit de faire entrer. Comme il a fermé lui-même sa porte à clef, il est impossible de savoir ce que ce vieux monsieur et l’avocat se sont dit ; mais ils sont restés environ une heure ensemble ; après quoi le vieux monsieur, accompagné de l’avocat, a fait monter son domestique. Jérôme a vu sortir ce domestique avec un immense paquet long de quatre pieds qui avait l’air d’une grosse toile à canevas. Le vieux monsieur tenait à la main un gros paquet de papiers. L’avocat, plus pâle que s’il allait mourir, lui qui est si fier, si digne, était dans un état à faire pitié… Mais il agissait si respectueusement avec le vieux monsieur qu’il n’aurait pas eu plus d’égards pour le roi. Jérôme et monsieur Albert Savaron ont accompagné ce vieillard jusqu’à sa voiture, qui se trouvait tout attelée de quatre chevaux. Le courrier est parti sur le coup de trois heures. Monsieur est allé droit à la Préfecture, et de là chez monsieur Gentillet qui lui a vendu la vieille calèche de voyage de feu madame Saint-Vier, puis il a commandé des chevaux à la poste pour six heures. Il est rentré chez lui pour faire ses paquets ; sans doute il a écrit plusieurs billets ; enfin il a mis ordre à ses affaires avec monsieur Girardet qui est venu et qui est resté jusqu’à sept heures. Jérôme a porté un mot chez monsieur Boucher où monsieur était attendu à dîner. Pour lors, à sept heures et demie, l’avocat est parti, laissant trois mois de gages à Jérôme et lui disant de chercher une place. Il a laissé ses clefs à monsieur Girardet qu’il a reconduit chez lui, et chez qui, dit Jérôme, il a pris une soupe, car monsieur Girardet n’avait pas encore dîné à sept heures et demie. Quand monsieur Savaron est remonté dans sa voiture, il était comme un mort. Jérôme, qui naturellement a salué son maître, l’a entendu disant au postillon : Route de Genève.

— Jérôme a-t-il demandé le nom de l’étranger à l’Hôtel National ?

— Comme le vieux monsieur ne faisait que passer, on ne le lui