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Il me fallait donc constater la situation de l’épave, apprécier quel devait être son état avant le naufrage, juger si tous les efforts avaient été tentés pour le remettre à flot. Je venais comme agent de la Compagnie, pour témoigner ensuite contradictoirement, si besoin était, dans le procès.

Au reçu de mon rapport, le directeur devait prendre les mesures qu’il jugerait nécessaires pour sauvegarder nos intérêts.

Le capitaine du Jean-Guiton connaissait parfaitement l’affaire, ayant été appelé à prendre part, avec son navire, aux tentatives de sauvetage.

Il me raconta le sinistre, très simple d’ailleurs. Le Marie-Joseph, poussé par un coup de vent furieux, perdu dans la nuit, naviguant au hasard sur une mer d’écume, — « une mer de soupe au lait », disait le capitaine, — était venu s’échouer sur ces immenses bancs de sable qui changent les côtes de cette région en Saharas illimités, aux heures de la marée basse.

Tout en causant, je regardais autour de moi et devant moi. Entre l’océan et le ciel pesant restait un espace libre où l’œil voyait au loin. Nous suivions une terre. Je demandai :