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Son regard errait sur les prairies, et il aperçut une tache bleue dans le sentier le long de la Brindille. C’était Médéric qui s’en venait apporter les lettres de la ville et emporter celles du village.

Renardet eut un sursaut, la sensation d’une douleur le traversant, et il s’élança dans l’escalier tournant pour reprendre sa lettre, pour la réclamer au facteur. Peu lui importait d’être vu, maintenant ; il courait à travers l’herbe où moussait la glace légère des nuits, et il arriva devant la boîte, au coin de la ferme, juste en même temps que le piéton.

L’homme avait ouvert la petite porte de bois et prenait les quelques papiers déposés là par des habitants du pays.

Renardet lui dit :

— Bonjour, Médéric.

— Bonjour, m’sieu le maire.

— Dites donc, Médéric, j’ai jeté à la boite une lettre dont j’ai besoin. Je viens vous demander de me la rendre.

— C’est bien, m’sieu le maire, on vous la donnera.

Et le facteur leva les yeux. Il demeura stupéfait devant le visage de Renardet ; il avait les joues violettes, le regard trouble, cerclé