Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, XVI.djvu/47

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

poussant un cri cadencé, sur la corde fixée au sommet, et l’immense mât soudain craquait et tombait sur le sol avec le bruit sourd et la secousse d’un coup de canon lointain.

Et le bois diminuait chaque jour, perdant ses arbres abattus comme une armée perd ses soldats.

Renardet ne s’en allait plus ; il restait là du matin au soir, contemplant, immobile et les mains derrière le dos, la mort lente de sa futaie. Quand un arbre était tombé, il posait le pied dessus, ainsi que sur un cadavre. Puis il levait les yeux sur le suivant avec une sorte d’impatience secrète et calme, comme s’il eût attendu, espéré, quelque chose à la fin du massacre.

Cependant, on approchait du lieu où la petite Roque avait été trouvée. On y parvint enfin, un soir, à l’heure du crépuscule.

Comme il faisait sombre, le ciel étant couvert, les bûcherons voulurent arrêter leur travail, remettant au lendemain la chute d’un hêtre énorme, mais le maître s’y opposa, et exigea qu’à l’heure même on ébranchât et abattit ce colosse qui avait ombragé le crime.

Quand l’ébrancheur l’eut mis à nu, eut