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se mit à courir sous la futaie vers la maison de M. Renardet.

Il allait au pas gymnastique, son bâton sous le bras, les poings fermés, la tête en avant ; et son sac de cuir, plein de lettres et de journaux, lui battait les reins en cadence.

La demeure du maire se trouvait au bout du bois qui lui servait de parc et trempait tout un coin de ses murailles dans un petit étang que formait en cet endroit la Brindille.

C’était une grande maison carrée, en pierre grise, très ancienne, qui avait subi des sièges autrefois, et terminée par une tour énorme, haute de vingt mètres, bâtie dans l’eau.

Du haut de cette citadelle, on surveillait jadis tout le pays. On l’appelait la tour du Renard, sans qu’on sût au juste pourquoi ; et de cette appellation sans doute était venu le nom de Renardet que portaient les propriétaires de ce fief resté dans la même famille depuis plus de deux cents ans, disait-on. Car les Renardet faisaient partie de cette bourgeoisie presque noble qu’on rencontrait souvent dans les provinces avant la Révolution.

Le facteur entra d’un élan dans la cuisine