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LE LIT 29.

comprends pas qu’on tolère sur les promenades que ces meurtriers publics promènent leurs instruments de mort. Il en faut, je le sais bien, mais qu’on les cache au moins, et qu’on ne les habille pas en mascarade avec des culottes rouges et des vestes bleues. On n’habille pas le bourreau en général, n’est-ce pas ?

La femme, sans répondre, haussait imperceptiblement les épaules, tandis que le mari, devinant le geste sans le voir, s’écriait :

— Faut-il être bête pour aller voir parader ces cocos-là.

La réputation de conquérant du capitaine Épivent était d’ailleurs établie dans toute l’armée française.


Or, en 1868, son régiment, le 102e hussards, vint tenir garnison à Rouen.

Il fut bientôt connu dans la ville. Il apparaissait tous les soirs, vers cinq heures, sur le cours Boïeldieu, pour prendre l’absinthe au café de la Comédie, mais avant d’entrer dans l’établissement, il avait soin de faire un tour sur la promenade pour montrer sa jambe, sa taille et sa moustache.

Les commerçants rouennais qui se promenaient aussi, les mains derrière le dos, préoccupés des affaires, et parlant de la hausse et