Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, XI.djvu/200

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Elle répondit :

— Va quérir M. Lavigne avec sa troupe. Il les fera prisonniers. C’est lui qui sera content.

Et le père Pichon sourit :

— C’est vrai qu’i sera content.

Sa fille reprit :

— T’as d’la soupe, mange-la vite et pi repars.

Le vieux garde s’attabla, et se mit à manger la soupe après avoir posé par terre deux assiettes pleines pour ses chiens.

Les Prussiens, entendant parler, s’étaient tus.

L’Échasse repartit un quart d’heure plus tard. Et Berthine, la tête dans ses mains, attendit.

Les prisonniers recommençaient à s’agiter. Ils criaient maintenant, appelaient, battaient sans cesse de coups de crosse furieux la trappe inébranlable du caveau.

Puis ils se mirent à tirer des coups de fusil par le soupirail, espérant sans doute être entendus si quelque détachement allemand passait dans les environs.

La forestière ne remuait plus ; mais tout ce bruit l’énervait, l’irritait. Une colère méchante s’éveillait en elle ; elle eût voulu les assassiner, les gueux, pour les faire taire.