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TOINE.

couvée à une poule. Ça naîtrait d’même. Quand ils seraient éclos j’porterais à vot’ poule les poussins de vot’ homme pour qu’a les élève. Ça vous en f’rait d’la volaille, la mé !

La vieille interdite demanda :

— Ça se peut-il ?

L’homme reprit :

— Si ça s’peut ? Pourqué que ça n’se pourrait point ? Pisqu’on fait ben couver d’s œufs dans une boîte chaude, on peut ben en mett’ couver dans un lit.

Elle fut frappée par ce raisonnement et s’en alla, songeuse et calmée.

Huit jours plus tard elle entra dans la chambre de Toine avec son tablier plein d’œufs. Et elle dit :

— J’viens d’mett’ la jaune au nid avec dix œufs. En v’là dix pour té. Tâche de n’point les casser.

Toine éperdu, demanda :

— Qué que tu veux ?

Elle répondit :

— J’veux, qu’tu les couves, propre à rien.

Il rit d’abord ; puis, comme elle insistait, il se fâcha, il résista, il refusa résolument de laisser mettre sous ses gros bras cette graine de volaille que sa chaleur ferait éclore.

Mais la vieille, furieuse, déclara :

— Tu n’auras point d’fricot tant que tu