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neau. Il criait toujours : « Allons, du beurre, des œufs, du madère. » Et il fallait lui apporter ça tout de suite en courant, ou bien il se fâchait et il vous en disait à vous faire rougir jusque sous les jupes.

Quand la journée fut finie, il se mit à fumer sa pipe devant la porte. Et comme je passais contre lui avec une pile d’assiettes, il me dit comme ça : « Allons, la gosse, viens-t’en jusqu’au bord de l’eau pour me montrer le pays ! » Moi j’y allai comme une sotte ; et à peine que nous avons été sur la rive, il m’a forcée si vite, que je n’ai pas même su ce qu’il faisait. Et puis il est parti par le train de neuf heures. Je ne l’ai pas revu après ça.

Je demandai :

— C’est tout ?

Elle bégaya :

— Oh ! je crois bien que c’est à lui Florentin !

— Qui ça, Florentin ?

— C’est mon petit !

— Ah ! très bien. Et tu as fait croire au canotier qu’il en était le père, n’est-ce pas ?

— Pardi !

— Il avait de l’argent, le canotier ?

— Oui, il m’a laissé une rente de trois cents francs sur la tête de Florentin.

Je commençais à m’amuser. Je repris :