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un million, mais il fait des petits son million, et elle n’en donne pas. C’est pour ma fille, c’est encore vrai ; mais, ma fille et moi, ça fait deux. Je serai bien avancé, moi, quand ma fille et mon gendre rouleront carrosse, si je n’ai rien à me mettre sous la dent. Vous comprenez la situation, n’est-ce pas ? »

Lesable opina du front : « C’est juste, très juste, ce que vous dites là. Votre gendre peut n’être pas parfait pour vous. Et on est toujours bien aise d’ailleurs de ne rien devoir à personne. Enfin je vous promets de faire mon possible, je parlerai au chef, je lui exposerai le cas, j’insisterai s’il le faut. Comptez sur moi ! »

Cachelin se leva, prit les deux mains de son collègue, les serra en les secouant d’une façon militaire ; et il bredouilla : « Merci, merci, comptez que si je rencontre jamais l’occasion… Si je peux jamais… » Il n’acheva pas, ne trouvant point de fin pour sa phrase, et il s’en alla en faisant retentir par le corridor son pas rythmé d’ancien troupier.

Mais il entendit de loin une sonnette irritée qui tintait, et il se mit à courir, car il avait reconnu le timbre. C’était le chef, M. Torchebeuf, qui demandait son commis d’ordre.

Huit jours plus tard, Cachelin trouva un