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se mêler au monde débraillé du dimanche.

Elles allaient avec lenteur, sur le chemin de halage, suivies des deux hommes qui causaient gravement du bureau.

Sur le fleuve, des yoles passaient, enlevées à longs coups d’aviron par des gaillards aux bras nus dont les muscles roulaient sous la chair brûlée. Les canotières, allongées sur des peaux de bêtes noires ou blanches, gouvernaient la barre, engourdies sous le soleil, tenant ouvertes sur leur tête, comme des fleurs énormes flottant sur l’eau, des ombrelles de soie rouge, jaune ou bleue. Des cris volaient d’une barque à l’autre, des appels et des engueulades ; et un bruit lointain de voix humaines, confus et continu, indiquait, là-bas, la foule grouillante des jours de fête.

Des files de pêcheurs à la ligne restaient immobiles, tout le long de la rivière ; tandis que des nageurs presque nus, debout dans de lourdes embarcations de pêcheurs, piquaient des têtes, remontaient dans leurs bateaux et ressautaient dans le courant.

Mme  Torchebeuf, surprise, regardait. Cora lui dit : « C’est ainsi tous les dimanches. Cela me gâte ce charmant pays. »

Un canot venait doucement. Deux femmes, ramant, traînaient deux gaillards couchés au