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BALLADE
QUE VILLON FEIT A LA REQUESTE DE SA MÈRE,
POUR PRIER NOSTRE-DAME.

Dame du ciel, regente terrienne,
Emperière des infernaulx palux,
Recevez-moy, vostre humble chrestienne,
Que comprinse soye entre voz esleuz,
Ce non obstant qu’oncques rien ne valuz.
Les biens de vous, ma dame et ma maistresse,
Sont trop plus grans que ne suis pecheresse,
Sans lesquelz biens ame ne peult merir
N’avoir les cieulx, je n’en suis jengleresse.
En ceste foy je vueil vivre et mourir.

A vostre Filz dictes que je suis sienne ;
Que de luy soyent mes pechez aboluz :
Pardonnés moi comme à l’Egyptienne,
Ou comme il feit au clerc Theophilus,
Lequel par vous fut quitte et absoluz,
Combien qu’il eust au diable faict promesse.
Preservez-moy, que je ne face cesse ;
Vierge, pourtant, me vouilliés impartir
Le sacrement qu’on celebre à la messe.
En ceste foy je vueil vivre et mourir.

Femme je suis povrette et ancienne,
Ne riens ne sçay ; oncques lettre ne leuz ;
Au monstier voy dont suis parroissienne
Paradis painct, où sont harpes et luz,