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POÉSIES

Qu’il se boutast bientost en voye,
Jugeant qu’il fust embesongné.
Ce seigneur vint, tout refrongné,
Vers l’hostesse, par bon moyen,
Et lui dit : « Mon cas va très bien ;
Mon procès est ennuyt jugé.
A coup, qu’il n’y ait plus songé,
Baillez-moy mon sac, somme toute,
Car j’ay paour et si fays grant doubte,
Que les seigneurs soyent departis. »
Il print son sac : « Adieu vous dis !
Je reviendray tout maintenant. »
Il s’en alla diligemment,
Atout ses procès et son sac ;
Et les seigneurs de Penessac
Et de Lamesou l’attendoyent ;
Lesquelz seigneurs si s’esbatoyent,
A recueillir les torcheculz
Des seigneurs qui estoyent venus
Aux chambres, et bien se pensoyent
Qu’à quelque chose serviroyent
Ilz ostèrent tous ces procès
De ce sac, et, par motz exprès,
L’emplirent de ces torcheculz ;
Puis, au soir, quand furent venuz
A leur logis, fut mis en garde,
Et, pour mieulx mettre en sauvegarde,
Il fut bouté, par grant humblesse
Avec les robbes de l’hostesse,
Qui sentoyent le muguelias.
Au soir, firent grant ralias ;
Le lendemain il fut raison
De departir de la maison
Pour s’en aller sans revenir.