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Mal me presse ; est temps desormais
Que crie à toutes gens merciz.


BALLADE
Par laquelle Villon crye mercy à chascun.

A Chartreux, aussi Celestins,
A mendians et aux devotes,
A musars et cliquepatins,
Servantes et filles mignottes,
Portant surcotz et justes cottes ;
A cuyderaulx d’amours transis,
Chaussans sans meshaing fauves bottes,
Je crye à toutes gens merciz !

A fillettes monstrans tetins,
Pour avoir plus largement hostes ;
A ribleurs meneurs de hutins,
A basteleurs traynans marmottes,
A folz et folles, sotz et sottes,
Qui s’en vont sifflant cinq et six ;
A veufves et à mariottes,
Je crye à toutes gens merciz !

Sinon aux trahistres chiens mastins,
Qui m’ont fait ronger dures crostes
Et boire eau maintz soirs et matins,
Qu’ores je ne crains pas trois crottes.
Je feisse pour eulx petz et rottes ;
Je ne puis, car je suis assis.
Bien fort, pour eviter riottes,
Je crye à toutes gens, merciz !