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VIII
PRÉFACE.

neries étaient tout à fait dans les mœurs du temps, et ne dépassaient sans doute pas les proportions de ce qu’on serait volontiers tenté d’appeler des bons tours ; mais ils étaient sur une pente glissante, et la justice n’entendait pas raillerie.

Rien ne prouve cependant que Villon ait eu maille à partir avec elle à cause de ses entreprises sur le bien d’autrui. On a parlé de ses deux procès : il en eut au moins trois, bien constatés par ses œuvres, et le premier, qu’on n’avait pas fait ressortir jusqu’à présent, est le seul dont le sujet soit indiqué d’une manière certaine. C’est la suite d’une affaire d’amour.

Avant de tomber dans ces relations honteuses avec des femmes perdues dont la Ballade de la Grosse Margot[1] nous donne l’ignoble tableau, Villon fut amoureux. Il connut l’amour vrai, l’amour naïf et timide[2]. Quel fut l’objet de cette passion, c’est ce qu’il n’est pas facile de dire. Il l’appelle de divers noms, Denise, Roze, Katherine de Vauzelles. Que ce fût une femme de mœurs faciles, une gentille bourgeoise ou une noble damoiselle, il paraît certain que c’était une coquette. Elle l’écouta d’abord, l’encouragea[3] et finit par le rebuter. Il s’en plaignit sans doute à ses compagnons, que les femmes qu’ils fréquentaient n’avaient pas habitués à de pareilles rigueurs, et qui se moquèrent de lui[4]. Villon s’emporta contre

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  2. Le doux souvenir de cette passion se montre en maints endroits des œuvres de Villon, mêlé à ses regrets et aux reproches qu’il adresse à sa maîtresse avide et cruelle. Voy. les huitains iii, iv, v et x du Petit Testament, lv à lix du Grand Testament, la ballade de la page 57, le rondeau p. 59, etc.
  3. Quoy que je luy voulsisse dire,
    Elle estoit preste d’escouter, etc. (P. 47.)

  4. …… qui partout m’appelle
    L’amant remys et renié, (P. 48.)