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et souvent louables. Et ici, voyez dans quelle série d’absurdités et d’immoralités on s’engage nécessairement quand on fonde la poste sur le principe de la fiscalité.

La taxe est fiscale ; donc elle doit dépasser de beaucoup le prix du service rendu ; donc les particuliers seront excités à faire la concurrence à l’État ; donc il faut leur ôter une liberté innocente, quelquefois précieuse ; donc il faut une sanction pénale.

Et quelle sanction ! Peut-on lire sans une insurmontable répugnance l’article 7 du projet de la Commission ? Un acte de simple obligeance puni comme un forfait ! Le port d’une lettre entraîner une amende qui peut aller à 6,000 francs ! Combien de crimes contre les propriétés, même contre les personnes, n’exposent point à une telle pénalité !

Avec la taxe à 10 centimes, — ou mieux à 5 centimes, — vous n’avez pas besoin de créer de délits. La nomenclature en est déjà assez longue. Vous pouvez rendre à chacun la liberté. On ne s’amusera pas à chercher des occasions incertaines, quand on aura sous la main la plus économique, la plus commode, la plus directe, la plus sûre et la plus prompte des occasions.

Puisque j’ai parlé de châtiments, je dois faire ressortir dans le projet de la Commission, un contraste dont je suis sûr que le sentiment public sera révolté.

Un homme se charge d’une lettre. En lui-même, l’acte n’est pas coupable. Ce n’est pas la nature des choses, c’est la loi, la loi seule, qui l’a fait tel. Cet homme peut être puni de 6,000 francs d’amende, et, qui plus est, par une autre fiction légale, le châtiment peut tomber sur un tiers qui n’a pas même eu connaissance du fait (art. 8).

Un fonctionnaire abuse du contre-seing. Il y a fraude aussi, et qui pis est fraude du plus mauvais caractère, fraude préméditée, calculée, intentionnelle. De plus, il y a faux, et