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17. — RÉFORME POSTALE[1].


Que sont devenues cette énergie française, cette audace, cette initiative qui frappaient le monde d’admiration ? Nous sommes-nous rapetissés à la taille des Lilliputiens ? L’intrépide géant s’est-il fait nain timide et trembleur ? Notre orgueil national se contente-t-il qu’on dise encore de nous : « Ce sont les premiers hommes du monde pour donner et recevoir des coups de sabre, » — et sommes-nous décidés à dédaigner la solide gloire de marcher résolument dans la voie des réformes fondées sur la justice et la vérité ?

On serait tenté de le croire, quand on lit ce rachitique projet émané de la commission de la Chambre, intitulé emphatiquement : Réforme postale.

L’État s’est emparé du transport et de la distribution des lettres. Je ne songe pas à lui disputer, au nom des droits de l’activité individuelle, ce délicat service, puisqu’il l’accomplit du consentement de tous.

Mais de ce que, par des motifs d’ordre et de sûreté, il s’est déterminé à dépouiller les citoyens de la faculté de se transmettre réciproquement leurs dépêches comme ils l’entendent, ne s’ensuit-il pas qu’il ne doit rien leur demander au delà du service rendu ?

Voyez les routes. Elles servent à la circulation des hommes et des choses, à quoi l’on a attaché tant de prix, que l’État, après avoir consacré des sommes énormes à leur confection, les livre, sans aucune rémunération, à l’usage des citoyens.

Eh quoi ! la circulation de la pensée, l’échange des sentiments, la transmission des nouvelles, les relations de père

  1. Mémorial bordelais du 23 avril 1846.(Note de l’édit.)