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responsabilité de l’article qui a paru hier dans le Constitutionnel, sur ou contre la liberté des échanges. Et pourtant, quand on voit ce manifeste suivre de si près celui du Journal des Débats, et ces deux feuilles élever bannière contre bannière, ne peut-on pas supposer, sans sortir du domaine des conjectures permises, que M. Thiers et M. Guizot ont transporté leur lutte sur le terrain de la réforme commerciale ?

S’il en est ainsi, on ne peut pas féliciter M. Thiers du rôle qu’il a pris. — Se placer dans les idées rétrogrades, planter sa tente au milieu du camp des monopoles, chercher la force dans la sympathie des intérêts égoïstes, c’est assurément manquer de tact ; c’est engager la partie avec des chances, peut-être actuellement favorables, mais qui, de leur nature, doivent aller toujours s’amoindrissant ; c’est abandonner à son adversaire des auxiliaires puissants : la liberté, la vérité, la justice, l’intérêt général et le développement naturel de la raison publique.

Mais laissons là le champ des conjectures, et, sans nous occuper des ressorts plus ou moins problématiques qui agissent sur le journalisme, examinons en lui-même l’article du Constitutionnel.

La première erreur où tombe cette feuille, c’est de supposer que les associations qui se forment pour la défense de la liberté, en matière d’échanges, aspirent à supprimer la douane, et qu’elles attribuent cette portée à la réforme de sir Robert Peel.

« À lire la plupart des appréciations de la mesure de sir Robert Peel, et quand on ignore les conditions d’existence mercantile de la Grande-Bretagne, on est tenté de croire que, sous peu, il n’y aura plus chez nos voisins, ni taxes à l’entrée, ni douanes. C’est, il faut le dire, une illusion bien naïve ; car, malgré les réformes, le gouvernement anglais s’arrange de manière à retirer encore des douanes un revenu de 450 à 500 millions de francs. Mal-