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J’ai toujours pensé que la question religieuse remuerait encore le monde. Les religions positives actuelles retiennent trop d’esprit et de moyens d’exploitation pour se concilier avec l’inévitable progrès des lumières. D’un autre côté, l’abus religieux fera une longue et terrible résistance, parce qu’il est fondu et confondu avec la morale religieuse qui est le plus grand besoin de l’humanité.

Il semble donc que l’humanité n’en a pas fini avec cette triste oscillation qui a rempli les pages de l’histoire : d’une part, on attaque les abus religieux et, dans l’ardeur de la lutte, on est entraîné à ébranler la religion elle-même. De l’autre, on se pose comme le champion de la religion, et, dans le zèle de la défense, on innocente les abus.

Ce long déchirement a été décidé le jour où un homme s’est servi de Dieu pour faire d’un autre homme son esclave intellectuel, le jour où un homme a dit à un autre : « Je suis le ministre de Dieu, il m’a donné tout pouvoir sur toi, sur ton esprit, sur ton corps, sur ton cœur. »

Mais, laissant de côté ces réflexions générales, je veux attirer votre attention sur deux faits dont les journaux d’aujourd’hui font mention, et qui prouvent combien sont loin d’être résolus les problèmes relatifs à l’accord ou la séparation du spirituel et du temporel.

On dit que c’est cette complète séparation qui résoudra toutes les difficultés. Ceux qui avancent cette assertion devraient commencer par prouver que le spirituel et le temporel peuvent suivre des destinées indépendantes, et que le maître du spirituel n’est pas maître de tout.

Quoi qu’il en soit, voici les deux faits, ou le fait.

  1. Ce projet d’article indique sa date lui-même. (Note de l’édit.)