tel besoin factice. Je dis que le besoin, considéré d’une manière générale et tel qu’il résulte de la nature à la fois corporelle et immatérielle de l’homme, combiné avec la puissance de l’habitude et le sentiment de la dignité, est indéfiniment expansible, parce qu’il naît d’une source intarissable, le désir. Qui blâmera l’homme opulent, s’il est sobre, peu recherché dans ses vêtements, s’il fuit le faste et la mollesse ? Mais n’est-il pas des désirs plus élevés auxquels il est permis de céder ? Le besoin de l’instruction a-t-il des limites ? Des efforts pour rendre service à son pays, pour encourager les arts, pour propager des idées utiles, pour secourir des frères malheureux, ont-ils rien d’incompatible avec l’usage bien entendu des richesses ?
Au surplus, que la philosophie le trouve bon ou mauvais, le besoin humain n’est pas une quantité fixe et immuable. C’est là un fait certain, irrécusable, universel. Sous aucun rapport, quant à l’alimentation, au logement, à l’instruction, les besoins du quatorzième siècle n’étaient ceux du nôtre, et l’on peut prédire que les nôtres n’égalent pas ceux auxquels nos descendants seront assujettis.
C’est, du reste, une observation qui est commune à tous les éléments qui entrent dans l’économie politique : richesses, travail, valeur, services, etc., toutes choses qui participent de l’extrême mobilité du sujet principal, l’homme. L’économie politique n’a pas, comme la géométrie ou la physique, l’avantage de spéculer sur les objets qui se laissent peser ou mesurer ; et c’est là une de ses difficultés d’abord, et puis une perpétuelle cause d’erreurs ; car, lorsque l’esprit humain s’applique à un ordre de phénomènes, il est naturellement enclin à chercher un criterium, une mesure commune à laquelle il puisse tout rapporter, afin de donner à la branche de connaissances dont il s’occupe le caractère d’une science exacte. Aussi nous voyons la plupart des auteurs chercher la fixité, les uns dans la valeur, les autres dans la