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de juger, de se rectifier, d’apprendre, ne constitue pas une perfectibilité individuelle, qu’est-ce qu’elle est ?

Et si l’union de toutes les perfectibilités individuelles, surtout chez des êtres susceptibles de se transmettre leurs acquisitions, ne garantit pas la perfectibilité collective, il faut renoncer à toute philosophie, à toute science morale et politique.

Ce qui fait la perfectibilité de l’homme, c’est son intelligence ou la faculté qui lui est donnée de passer de l’erreur, mère du mal, à la vérité génératrice du bien.

Ce qui fait que l’homme abandonne, dans son esprit, l’erreur pour la vérité, et plus tard, dans sa conduite, le mal pour le bien, c’est la science et l’expérience ; c’est la découverte qu’il fait, dans les phénomènes et dans les actes, d’effets qu’il n’y avait pas soupçonnés.

Mais, pour qu’il acquière cette science, il faut qu’il soit intéressé à l’acquérir. Pour qu’il profite de cette expérience, il faut qu’il soit intéressé à en profiter. C’est donc, en définitive, dans la loi de la responsabilité qu’il faut chercher le moyen de réalisation de la perfectibilité humaine.

Et comme la responsabilité ne se peut concevoir sans liberté ; comme des actes qui ne seraient pas volontaires ne pourraient donner aucune instruction ni aucune expérience valable ; comme des êtres qui se perfectionneraient ou se détérioreraient par l’action exclusive de causes extérieures, sans aucune participation de la volonté, de la réflexion, du libre arbitre, ainsi que cela arrive à la matière organique brute, ne pourraient pas être dits perfectibles, dans le sens moral du mot, il faut conclure que la liberté est l’essence même du progrès. Toucher à la liberté de l’homme, ce n’est pas seulement lui nuire, l’amoindrir, c’est changer sa nature ; c’est le rendre, dans la mesure où l’oppression s’exerce, imperfectible ; c’est le dépouiller de sa ressemblance avec