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propriété foncière qui offre encore la solution. C’est elle qui, sous le stimulant de l’intérêt personnel, fera produire au sol la plus grande quantité possible de subsistances. C’est elle qui, par la division des héritages, mettra chaque famille en mesure d’apprécier, quant à elle, le danger d’une multiplication imprudente. Il est bien clair que tout autre régime, le Communisme par exemple, serait tout à la fois pour la production un aiguillon moins actif et pour la population un frein moins puissant.

Après tout, il me semble que l’économie politique a rempli sa tâche quand elle a prouvé que la grande et juste loi de la mutualité des services s’accomplira d’une manière harmonique, tant que le progrès ne sera pas interdit à l’humanité. N’est-il pas consolant de penser que jusque-là, et sous le régime de la liberté, il n’est pas en la puissance d’une classe d’en opprimer une autre ? La Science économique est-elle tenue de résoudre cette autre question : Etant donnée la tendance des hommes à multiplier, qu’arrivera-t-il quand il n’y aura plus d’espace sur la terre pour de nouveaux habitants ? Dieu tient-il en réserve, pour cette époque, quelque cataclysme créateur, quelque merveilleuse manifestation de sa puissance infinie ? Ou bien faut-il croire, avec le dogme chrétien, à la destruction de ce monde ? Évidemment ce ne sont plus là des problèmes économiques, et il n’y a pas de science qui n’arrive à des difficultés analogues. Les physiciens savent bien que tout corps qui se meut sur la surface du globe descend et ne remonte plus. D’après cela, un jour doit arriver où les montagnes auront comblé les vallées, où l’embouchure des fleuves sera sur le même niveau que leur source, où les eaux ne pourront plus couler, etc., etc. : que surviendra-t-il dans ces temps-là ? La physique doit-elle cesser d’observer et d’admirer l’harmonie du monde actuel, parce qu’elle ne peut deviner par quelle autre harmonie Dieu pourvoira à un état de choses très-