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et le lecteur va en juger. Il verra s’ils ne confondent pas toujours et partout l’Utilité gratuite, non rémunérable, sans valeur, avec l’Utilité onéreuse, seule due au travail, seule, d’après eux-mêmes, pourvue de valeur.


Ad. Smith. « Dans la culture de la terre, la nature travaille conjointement avec l’homme, et, quoique le travail de la nature ne coûte aucune dépense, ce qu’il produit n’en a pas moins sa Valeur, aussi bien que ce que produisent les ouvriers les plus chers. »


Voici donc la nature produisant de la Valeur. Il faut bien que l’acheteur du blé la paye, quoiqu’elle n’ait rien coûté à personne, pas même du travail. Qui donc ose se présenter pour recevoir cette prétendue valeur ? À la place de ce mot, mettez le mot utilité, et tout s’éclaircit, et la Propriété est justifiée, et la justice est satisfaite.


« On peut considérer la rente comme le produit de cette puissance de la nature dont le propriétaire prête la jouissance au fermier… Elle est (la rente !) l’œuvre de la nature, qui reste après qu’on a déduit ou compensé tout ce qu’on peut regarder comme l’œuvre de l’homme. C’est rarement moins du quart et souvent plus du tiers du produit total. Jamais une quantité égale de travail humain, employé dans les manufactures, ne saurait opérer une aussi grande reproduction. Dans celles-ci, la nature ne fait rien, c’est l’homme qui fait tout. »


Peut-on accumuler en moins de mots plus d’erreurs dangereuses ? Ainsi le quart ou le tiers de la valeur des subsistances est dû à l’exclusive puissance de la nature. Et cependant le propriétaire se fait payer par le fermier, et le fermier par le prolétaire, cette prétendue valeur qui reste après que l’œuvre de l’homme est rémunérée. Et c’est sur cette base que vous voulez asseoir la propriété ! Que faites-vous d’ailleurs de l’axiome : Toute valeur vient du travail ?

Puis voici la nature qui ne fait rien dans les fabriques ! Quoi ! la gravitation, l’élasticité des gaz, la force des animaux n’aident pas le manufacturier ! Ces forces agissent dans les fabriques exactement comme dans les champs, elles