Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/197

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

naturels, indépendamment du concours de l’homme déjà payé séparément.

Mais je demanderai toujours : Qui profitera de mon service ?

Sera-ce le producteur de l’utilité, c’est-à-dire le sol ? Cela est absurde, et je puis attendre tranquillement qu’il m’envoie un huissier.

Sera-ce un homme ? mais à quel titre ? Si c’est pour m’avoir rendu un service, à la bonne heure. Mais alors vous êtes à mon point de vue. C’est le service humain qui vaut, et non le service naturel ; c’est la conclusion à laquelle je veux vous amener.

Cependant, cela est contraire à votre hypothèse même. Vous dites que tous les services humains sont rémunérés par quatorze francs, et que les deux francs qui complètent le prix du blé répondent à la valeur créée par la nature. En ce cas, je répète ma question : À quel titre un homme quelconque se présente-t-il pour les recevoir ? Et n’est-il pas malheureusement trop clair que, si vous appliquez spécialement le nom de propriétaire à l’homme qui revendique le droit de toucher ces deux francs, vous justifiez cette trop fameuse maxime : La propriété, c’est le vol ?

Et qu’on ne pense pas que cette confusion entre l’utilité et la valeur se borne à ébranler la propriété foncière. Après avoir conduit à contester la rente de la terre, elle conduit à contester l’intérêt du capital.

En effet, les machines, les instruments de travail sont, comme le sol, producteurs d’utilité. Si cette utilité a une valeur, elle se paye, car le mot Valeur implique droit à payement. Mais à qui se paye-t-elle ? au propriétaire de la machine, sans doute. Est-ce pour un service personnel ? alors dites donc que la valeur est dans le service. Mais si vous dites qu’il faut faire un premier payement pour le service, et un second pour l’utilité produite par la machine,