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cette vérité : Tous les intérêts légitimes sont harmoniques. C’est l’idée dominante de cet écrit, et il est impossible d’en méconnaitre l’importance.

Il a pu être de mode, pendant un temps, de rire de ce qu’on appelle le problème social ; et, il faut le dire, quelques-unes des solutions proposées ne justifiaient que trop cette hilarité railleuse. Mais, quant au problème lui-même, il n’a certes rien de risible ; c’est l’ombre de Banquo au banquet de Macbeth, seulement ce n’est pas une ombre muette, et, d’une voix formidable, elle crie à la société épouvantée : Une solution ou la mort !

Or cette solution, vous le comprendrez aisément, doit être toute différente selon que les intérêts sont naturellement harmoniques ou antagoniques.

Dans le premier cas, il faut la demander à la Liberté ; dans le second, à la Contrainte. Dans l’un, il suffit de ne pas contrarier ; dans l’autre, il faut nécessairement contrarier.

Mais la Liberté n’a qu’une forme. Quand on est bien convaincu que chacune des molécules qui composent un liquide porte en elle-même la force d’où résulte le niveau général, on en conclut qu’il n’y a pas de moyen plus simple et plus sûr pour obtenir ce niveau que de ne pas s’en mêler. Tous ceux donc qui adopteront ce point de départ : Les intérêts sont harmoniques, seront aussi d’accord sur la solution pratique du problème social : s’abstenir de contrarier et de déplacer les intérêts.

La Contrainte peut se manifester, au contraire, par des formes et selon des vues en nombre infini. Les écoles qui partent de cette donnée : Les intérêts sont antagoniques, n’ont donc encore rien fait pour la solution du problème, si