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la suite d’une convention, d’un débat ; chacune des parties contractantes se détermine par la considération de son intérêt personnel, chacune d’elles fait un calcul dont la portée est celle-ci : « Je troquerai si le troc me fait arriver à la satisfaction de mon désir avec un moindre Effort. » — C’est certainement un merveilleux phénomène que des efforts amoindris puissent faire face à des désirs et à des satisfactions égales, et cela s’explique par les considérations que j’ai présentées dans le premier paragraphe de ce chapitre.

Quand les deux produits ou les deux services se troquent, on peut dire qu’ils se valent. Nous aurons à approfondir ultérieurement la notion de valeur. Pour le moment, cette vague définition suffit.

On peut concevoir le Troc circulaire, embrassant trois parties contractantes. Paul rend un service à Pierre, lequel rend un service équivalent à Jacques, qui rend à son tour un service équivalent à Paul, moyennant quoi tout est balancé. Je n’ai pas besoin de dire que cette rotation ne se fait que parce qu’elle arrange toutes les parties, sans changer ni la nature ni les conséquences du troc.

L’essence du Troc se retrouverait dans toute sa pureté, alors même que le nombre des contractants serait plus grand. Dans ma commune, le vigneron paye avec du vin les services du forgeron, du barbier, du tailleur, du bedeau, du curé, de l’épicier. Le forgeron, le barbier, le tailleur livrent aussi à l’épicier, contre les marchandises consommées le long de l’année, le vin qu’ils ont reçu du vigneron.

Ce Troc circulaire, je ne saurais trop le répéter, n’altère en rien les notions primordiales posées dans les chapitres précédents. Quand l’évolution est terminée, chaque coopérant a offert ce triple phénomène : désir, effort, satisfaction. Il n’y a eu qu’une chose de plus, l’échange des efforts, la transmission des services, la séparation des occu-