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plus naturel. Au fond, c’est à celui qui a faim d’aller chercher son blé. C’est une peine qui le regarde ; c’est un service qu’il se doit à lui-même. Si un autre, à quelque titre que ce soit, lui rend ce service et prend cette peine pour lui, cet autre a droit à une compensation. Ce que je dis ici, c’est pour constater que les services des intermédiaires portent en eux le principe de la rémunération.

Quoi qu’il en soit, puisqu’il faut recourir à ce que les socialistes nomment un parasite, quel est, du négociant ou du fonctionnaire, le parasite le moins exigeant ?

Le commerce (je le suppose libre, sans quoi comment pourrais-je raisonner ?) le commerce, dis-je, est porté, par intérêt, à étudier les saisons, à constater jour par jour l’état des récoltes, à recevoir des informations de tous les points du globe, à prévoir les besoins, à se précautionner d’avance. Il a des navires tout prêts, des correspondants partout, et son intérêt immédiat est d’acheter au meilleur marché possible, d’économiser sur tous les détails de l’opération, et d’atteindre les plus grands résultats avec les moindres efforts. Ce ne sont pas seulement les négociants français, mais les négociants du monde entier qui s’occupent de l’approvisionnement de la France pour le jour du besoin ; et si l’intérêt les porte invinciblement à remplir leur tâche aux moindres frais, la concurrence qu’ils se font entre eux les porte non moins invinciblement à faire profiter les consommateurs de toutes les économies réalisées. Le blé arrivé, le commerce a intérêt à le vendre au plus tôt pour éteindre ses risques, réaliser ses fonds et recommencer s’il y a lieu. Dirigé par la comparaison des prix, il distribue les aliments sur toute la surface du pays, en commençant toujours par le point le plus cher, c’est-à-dire où le besoin se fait le plus sentir. Il n’est donc pas possible d’imaginer une organisation mieux calculée dans l’intérêt de ceux qui ont faim, et la beauté de cette organisation, inaperçue des socialistes,