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êtes-vous, monsieur Bastiat ? Êtes-vous seulement un homme ?…

Comment ! après m’avoir abandonné successivement la métaphysique, à laquelle vous n’entendez rien ; la philosophie de l’histoire, que vous traitez de fatalisme ; le progrès économique, dont le dernier terme est la réduction à l’absurde de l’intérêt ; vous m’abandonnez encore la pratique financière, dont le plus magnifique corollaire est précisément la conversion du crédit payé en crédit gratuit ; et vous n’en persistez pas moins à soutenir la vérité absolue de votre théorie, que vous avez ainsi détruite de vos propres mains ! Vous lâchez pied partout ; la métaphysique, l’histoire, l’économie sociale, la banque, font successivement défaut à votre thèse, comme l’attention, la comparaison, la mémoire et le jugement à votre intelligence : encore une fois, quelle dialectique est la vôtre, et comment voulez-vous qu’on vous prenne ?

Et cependant, je ne me suis point découragé. J’ai voulu aller jusqu’au bout et tenter un dernier effort. J’ai cru que cette inertie des facultés intellectuelles pouvait provenir de l’absence de notions, et je me suis flatté de l’espérance de faire jaillir enfin l’étincelle dans votre âme. Vous-même paraissiez m’indiquer cette marche, quand vous me disiez : Convaincu que tout ce débat repose sur la notion du capital ; et, qu’en conséquence, vous essayiez de m’expliquer ce que vous entendez par capital ; puis donc qu’il est inabordable par la logique, me dis-je, attaquons-le par les notions. Il serait honteux qu’une pareille discussion finit sans que les deux adversaires pussent se rendre le témoignage, que s’ils n’ont pu s’accorder, au moins il se sont compris !

J’analyse donc, pour vous exprès, la notion de capital. Cette analyse terminée, je donne la définition ; j’en déduis les corollaires ; puis afin de ne laisser aucune ambiguïté dans les termes, j’appelle à moi la science du comptable.