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sentée algébriquement, de l’économie actuelle de la société. C’est là qu’on peut se convaincre que le prolétariat et la misère sont l’effet, non pas seulement de causes accidentelles, telles qu’inondation, guerre, épidémie ; mais qu’ils résultent aussi d’une cause organique, inhérente à la constitution de la société.

Par la fiction de la productivité du capital, et par les prérogatives sans nombre que s’arroge le monopoleur, il arrive toujours et nécessairement l’une de ces deux choses :

Ou bien c’est le monopoleur qui enlève au salarié partie de son capital social. B, C, D, E, F, G, H, I, K, L, ont produit dans l’année comme 10, et ils n’ont consommé que comme 9. En autres termes, le capitaliste a mangé un travailleur. — En outre, par la capitalisation de l’intérêt, la position des travailleurs s’aggrave chaque année de plus en plus ; de telle sorte qu’en poussant la démonstration jusqu’au bout on arrive, vers la septième année, à trouver que tout l’apport primitif des travailleurs est passé, à titre d’intérêts et de bénéfices, entre les mains du propriétaire-capitaliste-entrepreneur, ce qui signifie que les travailleurs salariés, s’ils voulaient payer leurs dettes, devraient travailler chaque septième année pour rien.

Ou bien, c’est le travailleur qui, ne pouvant donner de son produit que le prix qu’il en a lui-même reçu, pousse le monopoleur à la baisse, et par conséquent le met à découvert de tout le montant des intérêts, loyers et bénéfices dont l’exercice de la propriété lui faisait un droit et une nécessité.

On est donc amené à reconnaître que le crédit, dans le système de l’intérêt, a pour résultat inévitable la spoliation du travailleur, et pour correctif non moins inévitable, la banqueroute de l’entrepreneur, la ruine du capitaliste propriétaire. L’intérêt est comme une épée à deux tranchants : de quelque côté qu’il frappe, il tue.