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les transactions ; de l’argent, qui empêche les maisons et les terres, au lieu de se louer, de s’échanger, et les marchandises de se placer au comptant. L’argent, donc, intervenant partout comme capital supplémentaire, agent de circulation, instrument de garantie, c’est bien lui qu’il s’agit de payer, c’est bien le service qu’il rend qu’il est question de rémunérer.

Et, puisque d’un autre côté nous avons vu, d’après l’exposé du mécanisme de la Banque de France et les conséquences de l’accumulation de son encaisse, qu’un capital de 90 millions espèces, devant produire un intérêt de 4 p. 100 l’an, ne comporte, selon la masse d’affaires traités par la Banque, qu’un escompte de 3, de 2, de 1, de 3/4 p. 100, il est bien évident que les 1,600 millions d’intérêts que le peuple paye à ses usuriers, banquiers, rentiers, notaires et commanditaires ont uniquement pour objet d’acquitter le loyer d’un milliard, or et argent, à moins que vous ne préfériez reconnaître, avec moi, que ces 1,600 millions sont le produit du vol…

Je vous l’ai dit, monsieur, dès le commencement de cette dispute, et je le répète, il n’est jamais entré dans ma pensée d’accuser les hommes. Ce que j’incrimine, ce sont les idées et les institutions. Sous ce rapport, j’ai été, dans toute cette discussion, plus juste que l’Église, plus charitable que l’Évangile même. Vous avez vu avec quel soin j’ai séparé, dans la question du prêt à intérêt, l’homme de l’institution, la conscience de la théorie. Jamais je n’accuserai la société : en dépit de tous les crimes de mes semblables, et des vices de mon propre cœur, je crois à la sainteté du genre humain.

Cependant, quand je réfléchis que c’est contre des folies pareilles que la Révolution se débat aujourd’hui ; quand je vois des millions d’hommes sacrifiés à de si exécrables utopies, je suis près de céder à ma misanthropie, et je ne me