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énoncée dans vos troisième et quatrième propositions, savoir, que l’intérêt baisse à mesure que le capital s’accroît, mais de telle sorte que le revenu total du capitaliste augmente.

Eh bien, il n’en est rien. Le capital de la Banque est resté le même, 90 millions. Seulement, la Compagnie, en vertu de son privilége, et à l’aide de son mécanisme financier, a trouvé moyen d’opérer avec le commerce comme si son capital était, non plus seulement de 90 millions, mais de 450, c’est-à-dire cinq fois plus grand.

Est-il possible, direz-vous ? — Voici le procédé ; il est fort simple, et j’en puis parler : c’est précisément un de ceux que se proposait d’employer la Banque du Peuple, pour arriver à l’annihilation de l’intérêt.

Pour éviter les ports d’espèces, et la manipulation encombrante des écus, la Banque de France fait usage de bons de crédit, représentatifs de l’argent qu’elle a dans ses caves, et qu’on appelle Billets de Banque. Ce sont ces billets qu’elle remet d’ordinaire à ses clients, contre les lettres de change et billets à ordre qu’ils lui portent, et dont elle se charge d’opérer, sous garantie toutefois des tireurs comme des tirés, le recouvrement.

Le papier de la Banque a, de la sorte, un double gage : le gage des écus qui sont dans la caisse, et le gage des valeurs de commerce qui sont dans le portefeuille. La sécurité donnée par ce double gage est si grande, qu’il est reçu dans le commerce de préférer le papier aux espèces, que chacun aime autant savoir à la Banque que dans le tiroir de sa commode.

On conçoit même, en thèse absolue, qu’à l’aide de ce procédé, la Banque de France puisse se passer entièrement de capital et faire l’escompte sans numéraire : en effet, les valeurs de commerce qu’elle reçoit à l’escompte, et contre lesquelles elle donne ses billets, devant lui être remboursées,