Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/409

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faire adopter l’usage par leurs concitoyens. (Applaudissements.) Je sais que ces grands et nobles résultats n’ont pas atteint les limites auxquelles aspirent les hommes de cœur qui dirigent la Ligue. Nous en avons le témoignage par des faits irrécusables, que nous ne nions pas et qu’au contraire nous regardons loyalement en face. Ils nous sont d’ailleurs rappelés surabondamment par certains journaux. « Voyez, disent-ils, dans combien d’élections la Ligue a échoué, dans combien elle n’a pas osé accepter le combat ! Elle a été battue dans le Sud-Lancastre et à Birmingham. » — Il est vrai que nous n’avons pu soutenir la lutte à Hortham, Cirencester et ailleurs. Qu’est-ce à dire ? Je ne m’en afflige pas. Il est bien que dans une cause comme celle-ci — qui intéresse une multitude de personnes étrangères aux agitations politiques et aux rudes travaux qui peuvent seuls assurer le succès d’une grande réforme sociale — il est bien qu’on ne se laisse point dominer par cette idée, qu’il suffit d’instruire le peuple de ce qui est juste et vrai, pour que le vrai et le juste triomphent d’eux-mêmes. Car, si ces élections eussent amené d’autres résultats, quel enseignement en aurions-nous obtenu ? Quel effet auraient-elles produit sur le grand nombre de ceux qui, pour la première fois, s’unissant à la Ligue, se sont précipités dans le tumulte de l’agitation ? Ils n’auraient pas manqué de penser que les électeurs sont libres dans leur opinion et dans leur action, que l’intimidation, la corruption et les menées de sinistres intérêts n’interviennent pas pour pervertir la conscience des votants, et les vaincre en dépit de leurs idées et de leurs sentiments ; et cet enseignement eût été un mensonge. Ils en auraient conclu encore que le monopole, loin de songer à faire des efforts vigoureux et désespérés, loin d’avoir recours aux armes les plus déloyales, n’attend pour abandonner la lutte que de voir la vanité et l’injustice de ses prétentions bien comprises par le public ; — et cet enseignement aussi eût été un mensonge. — Ces faciles triomphes eussent fait croire que l’esprit de parti est vaincu ; qu’il a appris la sagesse et la droiture ; et que, dans le vain but de soutenir quelque point de sectairianisme politique, l’opposition ne se laisserait pas vaincre en se divisant alors qu’elle peut être vic-