Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/309

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efforcé de soutenir votre cause. Je viens ici pour en appeler de l’oppresseur à l’opprimé, — de ceux qui font la loi à ceux qui sont victimes de la loi. (Bruyante approbation). Ce n’est pas qu’en quelques occasions, je n’aie entendu développer au Parlement d’excellentes doctrines économiques. J’y ai entendu professer les plus saines doctrines à propos de liéges (rires), et je me suis d’abord étonné de l’unanime accueil qu’elles y ont reçu. (Écoutez ! écoutez !) Mais en regardant autour de moi, j’ai vu qu’il n’y avait pas de fabricants de bouchons dans la Chambre. (Nouveaux rires.) J’ai vu encore étaler d’excellents principes au sujet de paille tressée ; mais il n’y a pas d’ouvriers empailleurs derrière les bancs de la trésorerie (on rit plus fort), et cette nuit même, j’ai été surpris de voir comme a été bien reçu le dogme de la liberté à propos de raisins de Corinthe. Seulement, je me suis pris à penser que, dans tous mes voyages en chemin de fer dans le pays, je n’ai jamais traversé une plantation de cette espèce. De tout cela je conclus que vous pouvez en user sans façon avec les pauvres bouchonniers, empailleurs, et renverser toute la nichée des petits monopoles ; mais ôtez un brin de paille à la ruche des grands monopoles, et vous serez assailli par une nuée de frelons (bruyants applaudissements), qui vous feraient un mauvais parti si leur aiguillon répondait à leur bourdonnement. (Rires et acclamations.) Il n’est pas hors de propos de dire comment nous avons été traités dans cette Chambre. Je me souviens que les seuls arguments qu’on opposa à M. Villiers, la première fois qu’il porta la question au Parlement, ce furent des murmures et des ricanements. Mais quand l’opinion publique a été éveillée dans le pays, ils ont jugé prudent de rompre le silence, et, descendant de leur dédaigneuse position, ils se sont mis à parler de droits acquis. Plus tard, et à mesure que le public a pris la question avec plus de chaleur, ils ont commencé à argumenter. Battus sur tous les points, chassés de position en position, incapables de rester debout, les voilà maintenant qui reviennent sur leurs pas et ne savent plus qu’invoquer les droits acquis. Notre noble Président a déjà fort bien dévoilé la nature de ces droits acquis. Excusez-moi si je m’arrête un moment à expliquer en quoi ils consistent. À ma manière de voir, posséder un droit