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la culture du froment. — Voyez le lin. Pendant que M. Warnes se donnait beaucoup de mouvement, dépensait beaucoup d’encre et de paroles pour prouver que le fermier anglais ne pouvait soutenir la concurrence du dehors, lui-même substituait, et avec succès, la culture du lin, qui n’est pas protégée, à celle du froment, qui est l’objet de tant de prédilections législatives…

« Quant aux avantages que la loi-céréale est censée conférer aux simples ouvriers des campagnes, j’avance ce fait, et je défie qui que ce soit de le contredire : c’est que les salaires vont toujours diminuant à mesure qu’on s’éloigne des districts manufacturiers et qu’on s’enfonce au cœur des districts agricoles. En arrivant dans le Dorsetshire, le plus agricole et par conséquent le plus protégé de tous les comtés, on trouve le taux des salaires fixé à 6 sh. par semaine. Pour moi, je donne 12 sh. au moindre de mes ouvriers. J’en ai qui gagnent 20, 30 et même 35 sh. Mais quant à ceux qui ne donnent que le travail le plus brut, qui ne font que ce que tout homme peut faire, ils reçoivent au moins 12 sh. — Je n’en tire pas vanité. Ce n’est ni par plaisir ni par philanthropie que j’accorde ce taux ; je le fais parce que c’est le taux établi par la libre concurrence. Voilà un fait général qui ne permet plus de dire que la loi-céréale favorise l’ouvrier des campagnes. (Écoutez ! écoutez !) — Mais j’aperçois ici bon nombre d’ouvriers des fabriques. Quant à eux, il est certain que la loi-céréale les dépouille, sans aucune compensation, et j’expliquerai comment cela se fait, il y a une certaine doctrine à l’usage des ignorants imberbes, selon laquelle les salaires peuvent être fixés par acte du Parlement. Je mettrai en lumière et cette doctrine et le caractère de la loi-céréale, par une anecdote qui se rapporte à un fait parlementaire qui m’est personnel. Lorsque sir Robert Peel présenta la dernière loi-céréale à la Chambre des communes, loi qui avait pour but avoué de maintenir le prix du blé à 56 sh., ainsi que l’auteur le déclare expressément, je fis, par voie d’amendement, cette motion : Qu’il est expédient, avant de fixer le prix du pain par acte du Parlement, de rechercher les moyens de fixer aussi un taux relatif des salaires qui soit en harmonie avec ce prix artificiel