Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/197

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lourde responsabilité, comme chrétien et comme citoyen, sur quiconque néglige de plaider l’abrogation de la loi-céréale. Je ne veux pas qu’on infère de mes paroles qu’il n’y a pas, selon moi, des hommes consciencieux parmi nos adversaires ; mais, dans l’état présent du pays, la neutralité n’a pas d’excuse. Une loi, parmi les Spartiates, condamnait à mort les citoyens qui ne prenaient pas parti dans les grandes questions d’intérêt public. Quoique la Ligue n’entende pas infliger à ceux qui restent neutres d’exclusion physique, il est une exclusion civile dont elle frappera les citoyens qui n’entrent pas dans ses rangs. Si les banquiers, les armateurs et les marchands de la cité de Londres ne trouvent pas de loisirs pour étudier cette grande question, qu’ils soient moralement déposés du rang qu’ils occupent dans l’opinion publique, qu’ils descendent dans l’estime de leurs concitoyens au niveau de leurs commis et de leurs portiers ; ils ne méritent pas d’être élevés sur un piédestal d’or pour être vénérés comme des idoles. Qu’ils soient jugés selon leur mérite. (Applaudissements.) Tout homme qui comprend la question doit sortir de l’inaction et s’efforcer de rallier ses semblables à la vérité, car ce n’est que par la force de l’opinion que cette grande réforme peut être résolue. Il n’est personne qui ne puisse beaucoup pour l’avancement de notre cause. Des hommes, dont les noms étaient jusqu’ici inconnus, ont rendu de grands services en propageant autour d’eux les doctrines de la liberté commerciale. Je citerai un membre de la Société des Amis, qui, depuis deux années, a mis à distribuer les pamphlets de la Ligue une prodigieuse activité. Il a parcouru à pied tout le pays, depuis le comté de Warwick jusqu’au Hampshire, et a disséminé partout les vérités et les lumières. Avec le secours de tels auxiliaires, il nous est bien permis d’entretenir l’espoir d’un triomphe prochain et définitif. Cet humble serviteur de notre œuvre n’a été dirigé que par la conscience d’accomplir envers ses frères un grand devoir de charité. (Bruyantes acclamations.) Voilà un homme qui ne verserait pas une goutte de sang, même pour défendre sa propre vie, qui a visité plus de vingt mille maisons, y a déposé le germe de la vérité et de la justice, et qui, pour cette grande cause, a supporté plus de fatigues et de