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Pendant cette crise agricole, l’esprit d’entreprise reçut une impulsion également désordonnée et non moins funeste. Le capital revenait en masse de l’agriculture à l’industrie. En admettant que la consommation de l’Angleterre soit de 16 millions de quarters de blé, la dépense du pays pour la nourriture présentait, comparativement aux années de cherté, une économie annuelle de 32 millions de livres sterling, ou 800 millions de francs. Une masse aussi énorme de fonds disponibles, à un moment donné et inattendu, occasionna comme une pléthore dans la circulation. Il n’est pas d’opération hasardeuse qui ne parvînt à séduire les capitalistes. C’est alors que furent engouffrées des sommes considérables, et à jamais perdues, dans les mines du Mexique et dans les nombreux emprunts des jeunes républiques américaines.

La réaction devait suivre naturellement. Nous avons vu que la culture du froment, devenue ruineuse, avait été abandonnée dans une proportion énorme. L’encombrement des blés disparut peu à peu et fit place à une nouvelle disette. Les prix firent une nouvelle ascension :


1822 45 sh.
1823 51
1824 62
1825 66
1826, et jusqu’en 1831 66 environ.


Quelle fut alors la situation des fermiers ? Le prix s’était relevé sans doute, mais non à leur profit, ou du moins dans une mesure très-bornée ; car cette disette provenait précisément de ce qu’ils avaient restreint leurs cultures. Ce fut donc l’étranger qui réalisa les grands prix, d’autant que l’échelle mobile, décrétée pendant cette crise (en 1828), diminua l’obstacle absolu mis par la loi antérieure à l’importation.