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vous pas vous-mêmes que la rareté et la cherté du fer font la fortune des forges ? N’empêchez-vous pas les Français d’acheter le fer à bon marché ? Ne faites-vous pas en cela prédominer l’intérêt de la production sur celui de la consommation ? Ne créez-vous pas, pour ainsi dire, la maladie afin de donner de la besogne au médecin ? Soyez donc conséquents. Ou c’est l’intérêt du consommateur qui vous guide, et alors recevez le fer ; ou c’est l’intérêt du producteur, et en ce cas, incendiez Paris. Ou vous croyez que la richesse consiste à avoir plus en travaillant moins, et alors laissez entrer le fer ; ou vous pensez qu’elle consiste à avoir moins avec plus de travail, et en ce cas brûlez Paris ; car de dire comme quelques-uns : Nous ne voulons pas de principes absolus, — c’est dire : Nous ne voulons ni la vérité, ni l’erreur, mais un mélange de l’une et de l’autre : erreur, quand cela nous convient, vérité quand cela nous arrange.

Cependant, Messieurs les Ministres, ce système de protection, quoique théoriquement en parfaite harmonie avec le régime prohibitif, pourrait bien être repoussé par l’opinion publique, qui n’a pas encore été suffisamment préparée et éclairée par l’expérience et les travaux du Moniteur industriel. Vous jugerez prudent d’en ajourner l’exécution à des temps meilleurs. Vous le savez, la production surabonde, il y a partout encombrement de marchandises, la faculté de consommer fait défaut à la faculté de produire, les débouchés sont trop restreints etc., etc. Tout cela nous annonce que l’incendie sera bientôt regardé comme le remède efficace à tant de maux.

En attendant, j’ai inventé un autre mode de protection qui me semble avoir de grandes chances de succès.

Il consiste simplement à substituer un encouragement direct à un encouragement indirect.

Doublez tous les impôts ; cela vous créera un excédant de recettes de 14 à 1 500 millions. Vous répartirez ensuite