Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/203

Cette page a été validée par deux contributeurs.

cinq années antérieures le contraire était arrivé. La douane et l’accise ayant été dégrévées, le revenu public s’était amélioré dans une proportion supérieure à l’accroissement de la population.

Le lecteur devine peut-être quelles conséquences les théoriciens tiraient de ces observations. Ils disaient au ministère : Vous ne pouvez plus grossir utilement le multiplicateur (le taux de la taxe) sans altérer dans une proportion plus forte le multiplicande (la matière imposable) ; essayez, en abaissant l’impôt, de laisser s’accroître les ressources du peuple.

Mais c’était là une entreprise pleine de périls. En admettant même qu’elle pût être couronnée de succès dans un avenir éloigné, on sait positivement qu’il faut du temps avant que les réductions de taxes comblent les vides qu’elles font, et, ne l’oublions pas, on avait en face le déficit.

Il ne s’agissait donc de rien moins que de creuser de plus en plus cet abîme, de compromettre le crédit de la vieille Angleterre, et d’ouvrir la porte à des catastrophes incalculables.

La difficulté était pressante. Elle accabla le ministère whig. Peel entra aux affaires.

On sait comment il résolut le problème. Il commença par mettre un impôt sur les riches. Il se créa ainsi des ressources, non-seulement pour combler le déficit, mais encore pour parer aux découverts momentanés que devaient entraîner les réformes qu’il méditait.

Grâce à l’income-tax, il soulagea le peuple du fardeau de l’accise, et, à mesure que la Ligue propageait les saines idées économiques, des restrictions de la douane. Aujourd’hui, malgré la suppression de beaucoup de taxes, l’abaissement de toutes les autres, l’Échiquier serait florissant, sans les calamités imprévues qui sont venues fondre sur la Grande-Bretagne.