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l’adjurons de dire, la main sur la conscience, s’il ne se sent pas en contradiction avec lui-même. Est-ce être propriétaire de son œuvre que de ne la pouvoir échanger sans blesser l’honnêteté et en payant l’impôt à l’État ? Suis-je propriétaire de mon vin, si je ne le puis céder à un Belge contre du drap, parce qu’il déplaît à M. Grandin que j’use du drap belge ?

Il est vrai que la Ruche populaire ne donne pas d’autre raison de son opposition au libre-échange, si ce n’est qu’il se produit dans notre pays à l’encontre des journaux indépendants. En cela, fait-elle preuve elle-même d’indépendance ? L’indépendance, selon nous, consiste à penser pour soi-même, et à oser défendre la liberté, même à l’encontre des journaux dits indépendants.

La même considération paraît avoir décidé une feuille de Lyon et une autre de Bayonne à se mettre du côté du privilége. « Comment ne serions-nous pas pour le privilége, disent-elles, quand nous le voyons attaquer par les journaux ministériels ? » Donc, si le ministère s’avisait de réformer les contributions indirectes, ces journaux se croiraient tenus de les défendre ? Il est triste de voir les abonnés se laisser traiter avec un tel mépris.

Mais laissons parler le Courrier de Vasconie :

« Il est très-vrai que le Libre-Échange a trouvé pour prôneurs tous les journaux ministériels de France et de Navarre, ce qui prouve, pour nous, une impulsion partie de haut lieu. »

Ce qu’il y a de pire dans ces assertions, c’est que ceux qui se les permettent n’en croient pas un mot eux-mêmes. Ils savent bien, et Bayonne en fournit de nombreux exemples, que l’on peut être partisan de la liberté sans être nécessairement ministériel, sans recevoir l’impulsion de haut lieu. Ils savent bien que la liberté commerciale, comme les autres, est la cause du peuple, et le sera toujours jusqu’à ce