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raison en principe, ce sont certainement les plus exécrables imposteurs qui aient jamais cherché à égarer le peuple.

Toujours est-il que la classe ouvrière ne sait pas qu’elle est opprimée et ce qui l’opprime. Aussi, tout en défendant ses droits, comme nous l’avons fait jusqu’ici et comme nous continuerons à le faire, nous ne pouvons nous associer à ses plaintes contre les riches, puisque ces plaintes, portant à faux, ne sont que de dangereuses et stériles déclamations.

Nous le disons hautement : ce que nous réclamons pour toutes les classes, dans l’intérêt de toutes les classes, c’est la justice, l’impartialité de la loi ; en un mot, la propriété et la liberté. À cette condition, nous ne voyons pas des classes, mais une nation. Malgré la mode du jour, notre esprit se refuse à admettre que toutes les vertus, toutes les perfections, toutes les pensées généreuses, tous les nobles dévouements résident parmi les pauvres, et qu’il n’y ait parmi les riches que vices, intentions perverses et instincts égoïstes. S’il en était ainsi, si le bien-être, le loisir, la culture de l’esprit pervertissaient nécessairement notre nature, il en faudrait conclure que l’éternel effort de l’humanité, pour vaincre la misère par le travail, est la manifestation d’un mobile à la fois dépravé et indestructible. Il faudrait condamner à jamais le dessein de Dieu sur sa créature de prédilection[1].

Il ne me reste pas d’espace pour réfuter la troisième accusation formulée contre l’économie politique, celle fondée sur cette assertion, qu’elle est l’expression du côté inférieur de l’homme. C’est, du reste, un vaste sujet sur lequel j’aurai occasion de revenir.

Parce que l’économie politique circonscrit le champ de ses investigations, on suppose qu’elle dédaigne tout ce qu’elle ne fait pas rentrer dans sa sphère. Mais, sur ce fondement, quelle science ne devrait-on pas condamner ? L’é-

  1. V. au tome VI, chap. vi, Moralité de la richesse. (Note de l’éditeur.)