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Or, nous le demandons à tout lecteur impartial, quelle que soit d’ailleurs son opinion sur le fond de la question, les journaux qui montrent l’irritation la plus acerbe contre un principe qu’ils proclament vrai, qui se vantent d’être les défenseurs des libertés publiques et proscrivent une des plus précieuses de ces libertés, tout en reconnaissant qu’elle est de droit commun comme les autres, qui étalent tous les jours dans leurs colonnes leur sympathie pour le pauvre peuple, et lui refusent la faculté d’obtenir de son travail la meilleure rémunération, ce qui est d’après eux-mêmes le résultat de la liberté, puisqu’ils la reconnaissent vraie en principe, ces journaux n’agissent-ils pas contre toutes les règles ordinaires ? Ne nous réduisent-ils pas à scruter le but secret d’une inconséquence aussi manifeste ? car enfin, on a un but quand on s’écarte aussi ouvertement de cette ligne de rectitude, en dehors de laquelle il n’y a pas de discussion possible.

On dira sans doute qu’il est fort possible d’admettre sincèrement un principe et d’en juger avec la même sincérité l’application inopportune.

Oui, nous en convenons, cela est possible, quoique à vrai dire il nous soit difficile d’apercevoir ce qu’il y a d’inopportun à restituer aux classes laborieuses la faculté d’accroître leur bien-être, leur dignité, leur indépendance, à ouvrir à la nation de nouvelles sources de prospérité et de vraie puissance, à lui donner de nouveaux gages de sécurité et de paix, toutes choses qui se déduisent logiquement de cette concession, vous avez raison en principe.

Mais enfin, quelque juste, quelque bienfaisante que soit une réforme, nous comprenons qu’à un moment donné elle puisse paraître inopportune à certains esprits prudents jusqu’à la timidité.

Mais si l’opposition, que nous rencontrons dans les meneurs du parti démocratique, était uniquement fondée sur