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s’ils se trompent. Ils cherchent, et le suffrage universel s’empare de tous les esprits ; ils cherchent, et le communisme se propage comme un incendie ; ils cherchent, et, pendant que vous jetez un voile sur la plaie hideuse, qui peut compter les erreurs, les systèmes, les illusions dans lesquels ils croiront trouver un remède à leurs maux et un frein à vos injustices ?

Ainsi, tout le monde souffre d’un état de choses si profondément illogique et vicieux. Mais si toute l’étendue du mal est appréciée quelque part, ce doit être au sommet de l’échelle sociale. Je ne puis pas croire que des hommes d’État comme M. Guizot, M. Thiers, M. Molé, soient depuis si longtemps en contact avec toutes ces turpitudes, sans avoir appris à les connaître et à en calculer les effrayantes conséquences. Il n’est pas possible qu’ils se soient trouvés tantôt dans les rangs, tantôt en face d’une opposition systématique, qu’ils aient été assaillis par des rivalités personnelles, qu’ils aient eu à lutter contre les obstacles factices que la fureur de les déplacer suscita sous leurs pas, sans qu’ils se soient dit quelquefois : Les choses iraient autrement, l’administration serait bien plus régulière et la tâche du gouvernement bien moins lourde, si les députés ne pouvaient devenir ministres.

Oh ! si les ministres étaient en face des députés ce que sont les préfets en présence des conseillers généraux ; si la loi supprimait dans la Chambre ces perspectives qui fomentent l’ambition, il me semble qu’une paisible et fructueuse destinée serait ouverte à tous les organes du corps social. Les dépositaires du pouvoir pourraient bien rencontrer encore des erreurs et des passions ; mais jamais de ces coalitions subversives à qui tous les moyens sont bons, et qui n’aspirent qu’à renverser cabinets sur cabinets, sous les coups d’une impopularité momentanément et intentionnellement égarée. Les députés ne pourraient avoir d’autres