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l’ornière des partis pour le faire entrer dans le champ des idées et des réformes, dans la voie des saines applications de la science économique à l’administration publique, il s’est trouvé tout seul, et il a dû reconnaître qu’en dehors du cercle étroit tracé par les lettres assemblées de quatre ou cinq noms propres, il n’y avait pas de discussion possible, il n’y avait pas de politique. À quoi sert de nier le mal ? Cela l’empêche-t-il d’exister ? Quand les journaux ne s’associent pas à des intérêts, ils s’associent à des passions ; et à les examiner elles-mêmes de près, ces passions ne sont le plus souvent que des intérêts égoïstes. Voilà la vérité. »

Quoi ! monsieur, vous n’êtes pas scandalisé, vous n’êtes pas épouvanté de cet effroyable aveu ? Ou peut-il vous rester aucun doute sur la cause d’une situation aussi pleine d’humiliations et de périls ? Ce n’est pas moi qui parle. Ce n’est pas un misanthrope, un républicain ou un factieux. C’est la presse elle-même qui dévoile son secret et qui vous dit où l’a réduite cette institution dont la moralité vous inspire tant de confiance. Depuis que l’enceinte, où l’on est censé discuter les lois, a été transformée en champ de bataille, les destins du pays, la paix et la guerre, la justice et l’iniquité, l’ordre et l’anarchie sont comptés pour rien, absolument pour rien en eux-mêmes ; ce sont les instruments du combat, qu’on prend et qu’on quitte selon ses exigences. Qu’importe qu’à chaque péripétie de cette lutte impie, la commotion se fasse sentir sur toute la surface du pays ? Elle est à peine apaisée que les armées changent de position, et que le combat recommence avec plus d’acharnement.

Enfin, l’esprit de parti, ce ver rongeur, ce cancer dévorant qui puise sa vie et sa force dans l’admissibilité des députés au pouvoir exécutif, faut-il que je le montre au sein des colléges électoraux ? Je ne parle pas ici des opinions, des passions, des erreurs politiques. Je ne parle pas même de la pusillanimité, de la vénalité de certaines consciences ; il n’est pas au pouvoir de la loi de rendre les hommes parfaits. Je n’ai en vue que les passions et les vices qui découlent directement de la cause dont je parle, qui se rattachent