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blique, ce n’est pas une chose aisée que de l’y faire rentrer et de l’y maintenir.

Le pouvoir, vaste corps organisé et vivant, tend naturellement à s’agrandir. Il se trouve à l’étroit dans sa mission de surveillance. Or, il n’y a pas pour lui d’agrandissements possibles en dehors d’empiétements successifs sur le domaine des facultés individuelles. Extension du pouvoir, cela signifie usurpation de quelque mode d’activité privée, transgression de la limite que je posais tout à l’heure entre ce qui est et ce qui n’est pas son attribution essentielle. Le pouvoir sort de sa mission quand, par exemple, il impose une forme de culte à nos consciences, une méthode d’enseignement à notre esprit, une direction à notre travail ou à nos capitaux, une impulsion envahissante à nos relations internationales, etc.

Et veuillez remarquer, messieurs, que le pouvoir devient coûteux à mesure qu’il devient oppressif. Car il n’y a pas d’usurpations qu’il puisse réaliser autrement que par des agents salariés. Chacun de ses envahissements implique donc la création d’une administration nouvelle, l’établissement d’un nouvel impôt ; en sorte qu’il y a entre nos libertés et nos bourses une inévitable communauté de destinées.

Donc si le public comprend et veut défendre ses vrais intérêts, il arrêtera la puissance publique dès qu’elle essayera de sortir de sa sphère ; et il a pour cela un moyen infaillible, c’est de lui refuser les fonds à l’aide desquels elle pourrait réaliser ses usurpations.

Ces principes posés, le rôle de l’opposition, et j’ose dire de la chambre tout entière, est simple et bien défini.

Il ne consiste pas à embarrasser le pouvoir dans son action essentielle, à lui refuser les moyens de rendre la justice, de réprimer les crimes, de paver les routes, de repousser l’agression étrangère.