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DE L’AVENIR DU COMMERCE DES VINS

ENTRE LA FRANCE ET LA GRANDE-BRETAGNE[1].


Aux membres de la Ligue, aux officiers du Board of trade, aux ministres du gouvernement anglais.


La Ligue provoque les réformes commerciales, le Board of trade les élabore, le ministre les convertit en lois : c’est donc à ces trois degrés de juridiction que j’adresse les réflexions qui suivent.

L’Angleterre ne produisant pas de vins, les droits de douane qui frappent ce liquide ne peuvent être considérés comme protecteurs. Par ce motif, ils ne suscitent pas les réclamations de la Ligue. Aussi voit-on les vins figurer parmi les huit articles auxquels paraît devoir se restreindre l’action du tarif anglais.

Cependant un droit, même fiscal, est contraire à la liberté du commerce, si, par son exagération, il prévient des échanges internationaux, s’il interdit au peuple des satisfactions qui n’ont en elles-mêmes rien d’immoral, s’il va jusqu’à lui ravir le choix de ses habitudes[2], si même, sacrifiant ce revenu public, qui lui sert de prétexte, on s’en sert comme d’un acte de représailles contre des tarifs étrangers, ou qu’on le réserve comme moyen d’agir sur ces tarifs[3]. C’est parce que l’administration anglaise est décidée

  1. Extrait du Journal des Économistes, no d’août 1845.
    (Note de l’éditeur.)
  2. J’ai souvent entendu dire, en Angleterre, que l’élévation des droits sur les vins de basse qualité était sans importance, parce qu’en aucun cas le peuple ne buvait de vin, dont il n’a pas l’habitude. Mais ne sont-ce pas ces droits qui ont créé ces habitudes ?
  3. Sir Robert Peel, en présentant son plan financier, a dit qu’il « réservait les droits sur les vins comme moyen d’amener la France à un traité de commerce. » Mais il a dit aussi que « si cette politique ne réussissait pas, y persévérer serait léser les intérêts du peuple anglais. »